Si vous lisez cet article, cela veut dire que je suis en vie, et bien en vie. Ceux qui me suivaient sur Twitter et Google+ on pu avoir quelques messages avant que je ne donne plus de signe de vie, étant en train de me battre pour la mienne. Retour sur une journée que je ne serais pas prêt d’oublier.
J’ai mal dormi cette nuit là. Et il y a de quoi se faire du mouron : c’est la toute dernière que je passerais à bord du Titanic. J’angoisse. Malgré les quelques préparatifs effectués pour me préparer au pire, je ne sais pas ce qu’il m’attends. J’ai sans doute l’avantage de connaître quand, comment, pourquoi le navire fera naufrage ; de connaître le moment du départ de chaque canot de sauvetage. Mais cela ne suffit pas. J’ai bien pris quelques dispositions au cas où, mais jamais je n’ai pu les expérimenter dans la nuit noire, avec des températures négatives et une eau à peine supérieure à 0°C. Dans ceux-ci sont compris l’embarquement sur moi de mon macbook pro, dans une sacoche étanche (le modèle dont se servent les plongeurs pour conserver des éléments au sec lors de leurs plongées). Aussi, j’enfilerai une combinaison de plongée type polaire, sous mes vêtements de soirées avant de quitter définitivement la suite. Mon livre de croquis aussi, très précieux (et sur le coup bien plus transportable que mon 400D que j’aurais risqué d’endommager de toute façon).
Donc c’est avant 9h que je suis debout. Je me fais livrer un petit déjeuner, formule habituelle, avec un supplément chocolatines. Je me fais couler un bain juste après, et m’habille pour l’Office religieux, auquel tout le monde se doit de prendre part. Je me rends dans la Salle à Manger, là où celui-ci est tenu, à 10h30. Celui-ci a une saveur toute particulière. Dimanche 14 Avril 1912… De nouveau un noeud à l’estomac. Va falloir contrôler tout ceci, et agir sans trop stresser.
J’essaie de trouver le repos à mon endroit favori, la Promenade Solaire. J’y exécute un rapide croquis. Et puis midi vient. L’heure de prendre un nouveau repas copieux. Cette fois-ci je me rends au restaurant 1ère Classe, plutôt que le Restaurant à la Carte. Je commencerais par des oeufs Argenteuil, puis quelques côtelettes de mouton grillées, ensuite quelques laitues et betteraves, et pour finir : du Roquefort ! Oui il y en a aussi ! Le repas fut léger en fin de compte. Tant mieux, car ce soir je compte faire un peu plus riche.
14h environ. Après un bon café, et m’être changé, direction la piscine (car il y a une piscine à bord, c’est dingue), afin de s’y détendre d’une part, et de se mettre un peu plus en conditions pour cette nuit. Les conditions seront radicalement différentes, mais cela me donnera une idée de quelques réflexes de base à avoir. Je teste par exemple mon apnée, qui est d’environ 1 minute. C’est peu, mais je ne peux guère faire mieux. Je me rends compte que je m’épuise quand même assez vite à la nage. J’aurais un gilet de sauvetage, ça devrait m’aider un peu mieux toutefois. J’y passe une bonne heure. C’est sur les 16h20 que je vais me prélasser aux Bains Turcs et son Hammam. Je n’aurais jamais imaginé un tel endroit à bord du Titanic, et pourtant. Je fais le vide dans mon esprit, dans la tête, ne pensant juste qu’à la joie d’être dans cette ambiance chaude, humide, confortable, loin de tout. Je ne vois même pas passer l’heure.
Ragaillardi par ces séances, et après être passé par ma suite pour m’y changer, je monte sur le pont, afin d’assister à cette fin d’après-midi, et aux derniers rayons de Soleil que le navire connaîtra. Le ciel en cette fin de journée est absolument limpide, dégagé, sans le moindre nuage. La surface de l’océan est plate, pratiquement pas ridée. Les pièces de l’échiquier se mettent en place, nous approchons doucement du moment fatidique. Je resterai jusqu’au début du crépuscule. Et puis, l’heure du repas. L’impression amère de prendre comme le « repas du condamné ». Il y aura un peu de tout, avec d’abord des hors d’oeuvres, du consommé Olga, sauté de poulet à la Lyonnaise, petits pois carotte à la crème, asperges vinaigrette et enfin, crèmes glacées à la française. Arrivé au bout de ce repas, d’une part je n’ai plus faim, et d’autre part, il est plus de 21h. Je me lève, dit poliment au revoir à mes compagnons de tablée, et vais dans ma suite.
Cela va être le commencement d’une nuit longue, très longue. Cela fera l’objet d’un article à part entière.